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Vers une approche européenne véritablement globale de la migration ?

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Mercredi 4 mars la Commission européenne a adopté ses orientations en matière d’immigration et les commissaires Frans Timmermans, premier vice-président, et Dimitris Avramopoulos, commissaire en charge des migrations, sont venus en salle de presse présenter une série d’actions clés visant à mettre en œuvre les orientations politiques du président Juncker en matière d’immigration.

 Quelques heures après une nouvelle tragédie au large de la Sicîle ayant causé la mort d’au moins dix migrants, les deux commissaires ont annoncé qu’à la mi-mai la Commission européenne présentera un programme européen global en matière de migration, visant à intensifier les efforts déployés par l’UE, et à améliorer tous les instruments existants et promouvoir une meilleure coopération dans le domaine de la gestion des flux migratoires provenant des pays tiers.

 Il s’agit, selon la Commission, d’une première étape qui consiste à mettre en place de nouvelles structures et méthodes de travail dans le traitement de la migration, «une question transversale», qui touche plusieurs domaines d’action et engage différents acteurs, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’UE.

 Selon le dernier rapport (Q3) publié par FRONTEX (l’agence européenne pour la surveillance des frontières extérieures de l’Union) en 2014 les entrées clandestines en Europe sont augmentées du 153%, une situation catastrophique. «On y découvre que de juillet à septembre 2014 il est entré en Europe quasiment trois fois plus de clandestins que durant le pire trimestre du printemps arabe de 2011» comme le journal « Le Figaro » du 4 mars l’ a reporté.

 «L’urgence est réelle» a souligné le commissaire Timmermans, «le temps est venu d’adopter une approche nouvelle sur la manière de travailler ensemble, en ce sens qu’il nous faut mieux tirer parti, et de façon plus cohérente, de tous les instruments dont nous disposons, définir ensemble les priorités communes et augmenter la mise en commun des ressources, tant au niveau national que de l’UE.»

 Mais les États membres présentent des asymétries dans leur exposition aux phénomènes migratoires. Il y a des États plus concernés par les migrations, comme l’Italie, la Suède, l’Allemagne, par rapport aux autres. À ce sujet M.Timmermans a évoqué la nécessité «d’assurer une véritable solidarité et un meilleur partage des responsabilités entre États membres.»

La solidarité a été mentionné aussi par le commissaire Avramopoulos. «Aucun État membre peut gérer tout seul le contrôle des frontières extérieures et le mot ‘solidarité’ ne doit pas rester un slogan», a-t-il souligné, «il faut qu’elle soit une réalité. Nous sommes tous dans le même bateau et notre responsabilité est commune.»

 Les commissaires ont rappelé les progrès que l’Union européenne a accompli dans cette dernière année en matière de migrations. Avramopoulos a déclaré que l’opération Triton, coordonné par Frontex, a sauvé la vie à de milliers de migrants depuis son lancement et elle a aidé à poursuivre et enquêter sur des dizaines de passeurs en coopération avec Europol. Mais «il faut faire plus».

 La future approche globale sur les migrations proposée par la Commission comprend quatre priorités:l’amélioration des systèmes d’asile européens, le renforcement de l’agence Frontex et son budget, l’ouverture de nouveaux canaux de migration légale et la lutte contre l’immigration illégale à travers la coopération avec les pays de départ et de transit et la lutte contre les réseaux criminels.

 En 2014 les demandes d’asile enregistrées dans l’Union européenne ont atteint 600.000 d’applications, une croissance très importante par rapport aux 435.000 demandes en 2013. 90% de ces demandes ont été accueillies seulement en dix États membres. À ce sujet la Commission affirme que le temps est venu de mettre en œuvre pleinement et de manière cohérente un régime d’asile européen commun et solide qui vise à réduire les différences entre les pays de l’UE en ce qui concerne les résultats des demandes d’asile, et à garantir un ensemble commun de droits et de procédures.

 Sur le volet du renforcement des frontières externes de l’Union européenne, les États membres sont appelés à mieux contribuer aux exigences budgétaire de l’agence Frontex. On a constaté que alors que les flux migratoires explosent, le budget de Frontex (100 millions d’euros par an environ) ne décolle pas. Il est donc nécessaire d’accroître son budget et d’augmenter les actifs opérationnels et les ressources humaines qui y sont alloués pour mieux répondre à l’évolution des phénomènes migratoires. Cette tâche incombe conjointement à tous les États membres de l’UE, au Nord comme au Sud, et elle doit être assumée dans un esprit de solidarité.

 Quant à la politique en matière de migration légale, les deux commissaires ont rappelé son importance du point de vue humanitaire et ainsi que du point de vue économique.

On estime que à partir de l’année 2000, 25.000 migrants ont perdu leur vie en essayant d’arriver en Europe. Face à ces événements tragiques , M. Avramopoulos a voulu souligner que «la migration, ce sont des personnes. Derrière chaque regard que nous croisons à nos frontières, il y a un individu: une personne voyageant dans le cadre de son travail, un étudiant venant faire ses études, une victime de la traite des êtres humains, un parent qui cherche à mettre son enfant en sécurité. Il faut envisager la migration sous toutes ses dimensions». L’idée est de permettre aux réfugié de venir plus facilement en Europe, en évitant les voyages périlleux, et d’augmenter le nombre des places de réinstallation offertes par les États membres aux réfugiés.

 Du point de vue économique la Commission, bien consciente des taux de chômage des États membres, considère que l’UE, à cause de ses contraintes démographiques, aura besoin de main-d’œuvre provenant des pays tiers. Au début de sa présidence, Jean-claude Juncker avait également déclaré: «une telle politique pourrait nous aider à remédier aux pénuries de qualifications spécifiques et à attirer des talents afin d’être mieux à même de relever les défis démographiques qui se posent à l’Union européenne». En luttant contre le chômage, cette nouvelle politique devra rendre l’UE plus attractive pour les travailleurs hautement qualifiés, selon les besoins du marché du travail de chaque pays. Elle devra aussi attirer les étudiants et les chercheurs, en facilitant leur circulation dans l’Union, afin de rendre l’Europe plus compétitive. C’est pourquoi la Commission a proposé de réexaminer la législation sur la «carte bleue européenne» (un titre de séjour qui sert également de permis de travail et qui concerne les travailleurs hautement qualifiés). Sa mise en œuvre est peu satisfaisante.

 En ce qui concerne la lutte contre la migration irrégulière, le programme prévoit d’intensifier l’action de l’Union européenne à travers des mesures et des outils concrets ciblant les pays et les itinéraires principaux. Selon le rapport publié par Frontex, en 2014 on a registré environ 278.000 franchissements irrégulières des frontières (deux fois plus qu’en 2011) et beaucoup ont eu recours à des passeurs ou ont été victimes de trafiquants d’êtres humains.

 Federica Mogherini, haute représentante et vice-présidente de la Commission, a déclaré qu’il faut approfondir la coopération avec les pays tiers d’origine et de transit «afin de traiter les causes à l’origine des phénomènes migratoires, et en particulier les crises qui s’étendent à nos frontières, surtout en Libye» a-t-elle déclaré. «Le but est d’offrir une protection dans des régions en proie à des conflits, de faciliter la réinstallation et la relocalisation et de lutter contre le trafic d’êtres humains en remontant les itinéraires qu’ils empruntent».

 Cette coopération s’insère dans des cadres de coopération existante comme les processus de Rabat et de Khartoum, et dans certains cas elle implique des discussions avec des dictateurs. À ce propos M. Avramopoulos a remarqué que «le fait que nous coopérions dans le cadre des processus de Khartoum et Rabat avec des régimes dictatoriaux ne signifie pas que nous les légitimions. Nous ne donnons aucune légitimité démocratique et politique à ces régimes, mais nous devons coopérer là où nous avons décidé de lutter contre la contrebande et la traite des êtres humains».

 Pendant le débat le règlement « Dublin II » a été évoqué par les deux commissaires. M. Avramopoulos, par son part, s’est montré plutôt «ouvert» à discuter du règlement et des difficultés rencontrées par les États dans sa mise en oeuvre. Par contre, M. Timmermans a précisé qu’il ne s’agissait pas de revoir ce règlement mais seulement d’apporter des améliorations dans l’application des règles existantes.

 La Commission s’est montré déterminée à stimuler les efforts de l’Union en matière de migration pour «une Union européenne plus sûre, plus prospère et plus attrayante». Il s’agit de discours que on a souvent entendu au sein des institutions européennes, mais est-ce bien le moment décisif pour les concrétiser? Ce programme donnera-t-il «un nouvel élan à l’Europe», comme le président Juncker se souhaitait?

  

Fiorenza Pandolfo

 

 

 

Pour en savoir plus:

      -. http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-4545_fr.htm

      -.http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-15-4544_en.htm

      -. http://www.europaforum.public.lu/fr/actualites/2015/03/comm-migration-frontex-rapport/index.html

      -. http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/03/04/01016-20150304ARTFIG00002-les-chiffres-chocs-de-l-immigration-illegale-en-europe.php

 


Classé dans:conditions d'accueil des réfugié_s, DROITS FONDAMENTAUX, IMMIGRATION, Immigration légale, Lutte contre l'immigration illégale, Politique d'intégration

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